OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Le nouvel observateur de tes mails http://owni.fr/2012/08/28/le-nouvel-observateur-de-tes-mails/ http://owni.fr/2012/08/28/le-nouvel-observateur-de-tes-mails/#comments Tue, 28 Aug 2012 15:09:21 +0000 Jean Marc Manach http://owni.fr/?p=118932 Le Nouvel Observateur, Laurent Joffrin déplore que l'État ne puisse pas vérifier la véracité de ce qu'écrivent les gens par e-mail. Petit florilège des réactions suscitées, sur Twitter et du côté des journalistes Internet, par cette étonnante proposition.]]>

En juillet 2011, Laurent Joffrin s’était illustré en sommant un utilisateur de Twitter de… ne pas le tutoyer. L’outrecuidant avait en effet osé le titiller en lui rappelant sa participation à l’émission de télévision “Vive la crise” qui, en 1984, prônait les vertus de la crise économique.

Le rabroué, par ailleurs contributeur de l’observatoire des médias Acrimed -qui a fait de Joffrin l’une de ses têtes de turc-, était revenu sur cet épisode dans un long article, Laurent Joffrin, de son côté, y consacrant l’un de ses éditos, Qui vous autorise @ me tutoyer ?

Un mois plus tard, @Laurent_Joffrin cessait de s’exprimer sur Twitter.

En cette rentrée politique 2012, Laurent Joffrin s’illustre de nouveau, avec un édito fustigeant, cette fois, les “dérives du web” :

Un texte circulant tout l’été de boîte e-mail en boîte e-mail a répandu de fausses informations sur la “Commission de rénovation et de déontologie” présidée par Lionel Jospin. L’illustration d’une dérive.

La “rumeur“, vilipendée par Laurent Joffrin ce 27 août 2012, avait déjà été dénoncée… le 25 juillet dernier, par Béatrice Houchard, rédactrice en chef adjointe du Figaro (reprise par Rue89), puis par Vincent Daniel de FranceTVInfo, ainsi que par Lionel Jospin sur Europe 1 (repris par Arrêts sur Images), et bien évidemment par l’AFP (repris par Le Monde). Le NouvelObs.com, par contre, n’avait jusque-là publié aucun article au sujet de cette rumeur.

Un mois après ses confrères, Laurent Joffrin remet donc le couvert, au prétexte que la rumeur continue à circuler par e-mail. Et de fustiger les “adversaires de toute régulation d’Internet“… comme s’il était possible, ou envisageable, de “réguler” la correspondance privée (comment ? en lisant tous les courriers ?), ou comme si l’État pouvait empêcher les rumeurs de se propager (en ne donnant le droit qu’à certains de parler, et l’ordre aux autres de se taire ?).

Le Net “ne produit rien”

Laurent Joffrin qui, rappelle Guillaume Champeau sur Numerama, avait déjà voulu taxer les FAI, mais également Google, avant d’apporter son soutien à la Hadopi, a toujours eu des problèmes avec le Net. Il s’était déjà prononcé, en l’an 2000, en faveur d’une régulation du Net, qualifiant même d’”idiots utiles du capitalisme sauvage” les opposants à une régulation étatique.

Déplorant le mauvais combat de Laurent Joffrin, Eric Mettout, rédacteur en chef de LExpress.fr, souligne quant à lui qu’”Internet n’est pas plus responsable des débordements qui s’y produisent que l’imprimerie des dérapages du Sun” :

Les tenants de sa neutralité ne sont pas allergiques « à toute application à la Toile des règles professionnelles ou des lois en vigueur dans les autres médias », mais, au contraire, aux carcans sur mesure, Acta, Sopa, Pipa, Hadopi, bientôt CSA… que veulent lui imposer ceux qui nous gouvernent – et quelques journalistes mal renseignés.

Par ailleurs, et comme le rappelle de son côté Xavier Berne sur PCInpact, le Net n’est pas une “zone de non-droit“, Martin Rogard, directeur France de DailyMotion, précisant à ce titre qu’on trouve 12960 citations du mot Internet sur legifrance…

En 2010, Laurent Joffrin, au détour d’une tribune appelant à “faire payer Google” au motif que “les internautes, pour une grande partie, se contentent de butiner les résumés qu’ils trouvent à portée de clic sur Google (et que) les journalistes du monde entier, sans trop en avoir conscience, travaillent ainsi, non pour le roi de Prusse, mais pour les actionnaires de Google”“, avait déjà étal toute son mépris et sa méconnaissance du Net en écrivant une phrase qui a beaucoup tourné sur Twitter :

Si le Net est un magnifique outil de diffusion, il ne produit rien.

Entre autres choses, le Net produit de la conversation, du débat, de la confrontation d’idées, il permet aux gens qui le veulent de pouvoir s’informer, se renseigner, de répondre à ceux qui écrivent n’importe quoi mais également de… s’offrir un bon coup de com’ buzz’ à peu de frais.

Benoît Raphaël souligne en effet que “Laurent Joffrin est remonté dans le radar des buzz de ce début de semaine“, au point d’arriver en 6e position sur les dernières 24 heures, derrière Rihanna et Johnny Halliday, et devant Neil Armstrong. Illustration avec ce petit florilège de vos réactions sur Twitter, où l’on ne trouvait personne à défendre la prise de position de Laurent Joffrin :


Photo de Laurent Joffrin via Wikimedia Commons (CC BY SA David Monniaux) et bidouillée par Owni ~~~~=:)

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Grossier clin d’oeil de l’UMP aux médecins http://owni.fr/2011/07/18/grossier-clin-doeil-de-lump-aux-medecins/ http://owni.fr/2011/07/18/grossier-clin-doeil-de-lump-aux-medecins/#comments Mon, 18 Jul 2011 13:14:54 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=73963 Alors que les déserts médicaux existent toujours autant, le Parlement vient de supprimer les mesures de contrainte qui visaient à les réduire.

La loi Hôpital, Patients, Santé Territoire de juillet 2009 initiée par la ministre de la Santé Roselyne Bachelot prévoyait en effet une amende annuelle de 3.000 euros pour les médecins libéraux des zones surmédicalisées qui ne prêtaient pas main forte à leurs confrères des zones sous-médicalisées. Dans le contrat de ces médecins qui soignent en cabinet – spécialistes ou non – figurait l’obligation de travailler une demi-journée par semaine dans ces coins de France délaissés, sous réquisition de l’Agence Régionale de Santé ou ARS. La commission mixte paritaire a donc mis au point un texte que les sénateurs puis les députés ont entériné mercredi 13 juillet et qui abroge ce point.

Actuellement, sur les 3.500 médecins s’installant chaque année, 10 % seulement se sont installés en libéral et parmi eux 180 généralistes. En 2009, il y a eu 6.000 départs en retraite. Le compte n’est déjà pas bon.

Efficacité limitée

Destinée à l’origine à lutter contre la désertion des médecins de certaines zones,  cette idée n’était en réalité que peu efficace et pour certains praticiens ne répartissait pas mieux l’offre de soins. Pour le docteur Dupagne, fondateur d’Atoute.org, référence en matière de forum médical, la mesure n’avait fait que renforcer chez les jeunes une sorte de raidissement à l’annonce de cette contrainte potentielle.

Vous ne pouvez pas forcer un médecin à se salarier ou à aller dans une zone précise. Et la médecine libérale est un exercice sacerdotal, c’est invendable pour les jeunes, que ce soit en zone où l’offre est correcte comme en zone sous-médicalisée. Il faudrait que les généralistes soient beaucoup plus nombreux, notamment à la campagne, pour une médecine de premier recours. Ils ne se plaignent pas de ne pas bien gagner leur vie mais de ne pas avoir une vie confortable.

Pour le docteur Garrigou-Granchamp, médecin généraliste à Lyon, la situation est plus qu’alarmante et il faut trouver des solutions durables pour éviter que l’hémorragie ne continue :

Le secteur libéral va se vider. Actuellement les médecins vont s’installer dans les zones dites “faciles”. Il faut mettre en valeur le secteur libéral et le rendre attractif à nouveau. Il y a pour ça plusieurs solutions possibles. À commencer par la modulation du tarif de la consultation en fonction de la difficulté d’exercice. Au Canada, le montant de la consultation est fixé de cette façon. Un moyen comme un autre d’attirer les médecins dans des zones plus ou moins délaissées.

Une des raisons de la fuite des médecins du secteur libéral : la lourdeur du système et de l’administratif. Les plus jeunes qui arrivent après une dizaine d’années d’études observent tout au long de leur apprentissage la dégradation de leur métier et des conditions de travail. Et la tentation de se salarier est grande, notamment parce que les permanences de soins ne sont alors pas obligatoires et les tâches administratives beaucoup moins lourdes. La solution “miracle” des politiques ? La création de maisons pluridisciplinaires. Mais le médecin explique que c’est un palliatif trop mince :

Pour se regrouper il faut qu’ils aient d’abord fait le choix du libéral. Derrière les déserts médicaux, il y a le problème du salariat et de l’installation en libéral. Et ces mesures coercitives ne valent rien. Dans le terme libéral, il reste liberté et vous ne pouvez pas forcer quelqu’un à s’installer dans un mode d’exercice qu’il n’a pas choisi. Ils pourront inventer tous les systèmes qu’ils voudront, ça ne fonctionnera pas. L’incitation peut-être pourrait améliorer les choses.

« La politique de la droite est très dure »

La suppression de la mesure, à la limite de la ponction financière, ressemble à quelques mois des élections à un petit signe du gouvernement au corps médical. Possible selon le médecin mais :

Il faudrait plus que ça. La mesure n’est pas à la hauteur. On est habitués à notre petit clin d’œil avant les élections mais la politique de droite est très dure avec les médecins. Entre le plan Juppé et celui de Seguin, rien de bien tendre pour le corps médical.

Mais pour le docteur Dupagne, il s’agit juste d’une question de bon sens de la part des sénateurs.

Alain Juppé a pu montrer à l’époque qu’il était capable de s’asseoir sur l’électorat médical. Il y a quand même un peu de bon sens. Cette mesure était une fausse bonne idée. Les députés et sénateurs se sont rendus compte que ce n’était pas envisageable de la laisser telle quel. C’est pour moi un sursaut de bon sens.

Tactique politique ou pas, à moins d’un an de la présidentielle, les médecins sont bien vaccinés et il en faudra plus – que l’abandon de ces mesures – pour conserver ou gagner des voix de cet électorat.


Retrouvez les articles du dossier : Carto des déserts médicaux et Où trouver l’hôpital le plus proche?

Illustration Flickr  PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales Solea20 et PaternitéPartage selon les Conditions Initiales jasleen_kaur

Illustration de Une : Marion Boucharlat

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Un point sur le débat sur la levée de l’anonymat des donneurs de gamètes http://owni.fr/2010/11/27/un-point-sur-le-debat-sur-la-levee-de-l%e2%80%99anonymat-des-donneurs-de-gametes/ http://owni.fr/2010/11/27/un-point-sur-le-debat-sur-la-levee-de-l%e2%80%99anonymat-des-donneurs-de-gametes/#comments Sat, 27 Nov 2010 08:58:48 +0000 Audrey Desantis http://owni.fr/?p=33489 Donneur, receveur, enfant issu d’IAD (insémination artificielle avec donneur) devenu maintenant adulte : suite à la tribune-témoignage d’Albertine Proust publiée le 9 septembre sur Sciences et Démocratie, chacun a eu l’occasion de donner son avis pour alimenter un débat riche et parfois passionné. Et force est de constater qu’à la veille du vote par l’Assemblée Nationale du projet de loi proposé par Roselyne Bachelot, ex-Ministre de la santé, le débat est loin d’être encore clos.

Une quête d’identité incomprise, des limites obscures

Roselyne Bachelot a tenu à l’assurer plusieurs fois : “l’anonymat du donneur sera respecté“. L’idée principale étant que le donneur de gamètes ne verra son anonymat levé qu’avec son accord préalable.  Cet accord ne sera sollicité qu’au moment de la majorité de l’enfant issu du don, si ce dernier en effectue la demande. D’après l’ex-Ministre de la santé,

“le texte prévoit aussi l’accès à des données non identifiantes du donneur, comme son âge. Des informations plus précises d’ordre socioprofessionnel et concernant sa motivation ne seront recueillies lors du don que si le donneur l’accepte.”

Les réactions sont sans appel et le doute s’installe quant à la nécessité de lever l’anonymat de telles informations. Quelles seront les limites ? Dans sa tribune, Albertine va plus loin en exprimant clairement son incompréhension face à cette “quête d’identité” :

Nous ne comprenons pas que des enfants de receveurs puissent faire de la découverte de l’identité du donneur un combat“.

Selon elle, l’histoire de l’enfant se démarque totalement de son origine génétique et du don de gamètes qu’elle a effectué mais s’ancre dans l’histoire de ses parents, de leur projet de conception, de leur chemin parcouru. Un avis parfois partagé, comme le décrit paulineadrien, dans un long commentaire argumenté.

Il me semble que le principal intérêt de retrouver le donneur pourrait être non-pas de savoir que le donneur est tourneur-fraiseur ou un polytechnicien ou qu’il mesure 1m85 [...] le principal intérêt pourrait être dans ce qu’on désigne par informations médicales“.

Un avis aussi souvent contredit, parfois de façon assez passionnelle. Un « IAD » de la première heure, aujourd’hui adulte, témoigne de sa quête identitaire :

Nous ne souhaitons pas établir ou nouer de relation durable avec notre donneur que nous ne considérons pas comme notre père ou notre mère, mais seulement voir son visage pour savoir ce qui constitue notre singularité et notre appartenance à l’humanité“.

Beaucoup semblent accepter le désir de certains adultes de connaître leurs origines génétiques, sans forcément le comprendre. Mais quelles sont les limites de la quête de chacun? Un visage, une discussion, des échanges réguliers ?

Et là, paraît la question du “tout-génétique”… et de la consanguinité !

Le coeur de la pensée d’Albertine Proust repose sur un refus de la mode du “tout-génétique” entretenue actuellement (1). Partout, l’on peut entendre parler de “gène de l’obésité”, “gène de l’intelligence”, “gène de l’alcoolisme”, un mélange de dérive sémantique – il faudrait plutôt parler de prédisposition génétique – et de scientisme édulcoré, où la biologie prend abusivement le dessus au détriment du psychologique et de l’affectif

Anne, qui témoigne sur le site de PMA (Procréation Médicalement Anonyme), association défendant la levée de l’anonymat, illustre bien cette idée :

Le plus difficile c’est de savoir que je ne saurai jamais qui est mon “père”, car pour moi il n’est ni un géniteur, ni un donneur… c’est mon père, biologique évidemment, mais mon père tout de même.

Dès lors se pose la question de définir les notions de père, mère, d’identité ou d’origine. Une question dont on trouve des éléments de réponse parmi les commentaires de la tribune. Eric défend l’idée de ne pas

confondre le fait de vouloir connaître ses conditions de naissance et le fait d’attribuer à la biologie des effets déterministes sur l’identité.

Quant à l’accès aux informations sur les donneurs, Valgm s’interroge :

Quand on vous fait miroiter l’illusion que c’est important, que ça vous sera bénéfique, comment ne pas être tenté ? Et tout ça pour quelles conséquences ?

Cette importance accordée aux gènes donne naissance à une peur tout aussi profonde que relativement injustifiée : celle du demi-frère ou de la demi-sœur cachés avec lesquels l’adulte issu d’IAD craint un rapport incestueux. Cette problématique est d’ailleurs abordée très vite dans le débat des internautes, notamment avec Chloé qui pose une question essentielle :

Cela voudrait-il dire qu’un enfant issu du don, et le sachant, vivra dans la peur constante de s’éprendre d’un demi-frère et devrait alors se restreindre à choisir qui ne lui ressemble pas de peur d’être en couple avec un membre de sa famille génétique ?“.

A vrai dire, la probabilité que cela arrive est quasiment nulle. Le risque de consanguinité est d’ailleurs plus élevé pour une personne conçue “traditionnellement”, d’après Eric qui précise qu’il y aurait

3 % d’enfants dont le père n’est pas l’ascendant génétique suite à un adultère“.

En France, depuis 1973, date de création des Cecos (Centre d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains), 50 000 enfants ont vu le jour suite à une IAD grâce à 9000 donneurs. Les lois de bioéthique instaurées en 1994 brident chacun à cinq dons, limite relevée plus tard à dix dons pour faire face à la pénurie de donneurs. Autrement dit, une goutte d’eau sur le nombre de naissances total depuis le début des années 70 (environ 30 millions). Pourtant, cette peur de la consanguinité et de l’inceste qui pourrait en résulter existe bel et bien.

Encore une fois, est-ce que l’on accorde une trop grande importance à la génétique et aux chromosomes, oubliant toute notion anthropologique de ce qu’est une famille, un “frère”, une “soeur” ? Quid de la notion de filiation entre le receveur et son enfant ? Faut-il conserver le mode actuel basé sur la filiation dite “charnelle” qui ne différencie pas un enfant issu d’un don d’un enfant “biologique” ou bien opter pour un mode proche de la filiation adoptive, en révélant donc potentiellement l’identité du donneur sur le certificat de naissance de l’enfant ?

Rétroactivité de la loi, sentiment de trahison et peur d’une diminution des dons

Après l’annonce de Roselyne Bachelot, les anciens donneurs se sont un peu sentis trahis et déconcertés face à une mesure allant à l’encontre des préconisations du rapport Leonetti publiées en janvier 2010. Pour Albertine Proust :

Maintenant que nous avons compris que notre anonymat pourrait à tout moment être remis en cause [...] la réaction la plus intelligente serait de demander la destruction de ce qu’il reste de nos dons. Nous ne voulons pas nous y résoudre

Et 70 % des donneurs suivent peu ou prou cet avis en étant contre la levée de l’anonymat. 60 % renonceraient d’ailleurs au don s’il leur était imposé de dévoiler leur identité. Du côté des receveurs aussi, des réactions hostiles naissent. Un quart d’entre eux semblerait renoncer à leur projet d’enfant si l’anonymat était levé. Par peur de voir leur famille déstabilisée ?

La peur de voir les dons diminuer s’accentue dans un contexte où les temps d’attente atteignent déjà six mois à un an pour bénéficier d’une IAD. Pour certains, aucun doute qu’une telle mesure va conduire à la “fuite” des dons et au développement de filières parallèles de dons illicites, sans limite, sans suivi, sans accompagnement. `

Pourtant les chiffres de pays précurseurs dans le domaine semblent indiquer le contraire. En Suède, premier pays dans le Monde à voter le même type de loi en 1984, le nombre de donneurs s’est stabilisé un an après son entrée en vigueur. Le Royaume-Uni ne paraît pas non-plus avoir été touché statistiquement par la levée de l’anonymat en 2005.

Mais le problème est ailleurs :

ne vaudrait-il pas mieux accompagner les couples qui ont recours à ces banques de gamètes?

interroge très justement Chloé en réponse à Albertine Proust. Toute la question est là.

Peu de parents révèlent à leurs enfants la façon dont ils ont été conçus, à cause du tabou et parfois de la honte de l’infertilité et des difficultés rencontrées. Mais alors que l’intérêt des enfants est à présent le plus mis en avant, ne serait-il pas plus constructif de mettre en avant l’intérêt de la famille dans son ensemble, autour du projet parental ? Quelles pourraient être les solutions mises en place pour accompagner les “receveurs” dans leur démarche et tout au long de leur vie ? Ces interrogations restent en suspens.

>> Article initialement co-publié sur Sciences et Démocratie & Prisme de tête

>> Images CC Flickr : M i x y et wellcome images

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http://owni.fr/2010/11/27/un-point-sur-le-debat-sur-la-levee-de-l%e2%80%99anonymat-des-donneurs-de-gametes/feed/ 2
Levée de l’anonymat des donneurs de gamètes : un point sur le débat http://owni.fr/2010/11/19/levee-de-l%e2%80%99anonymat-des-donneurs-de-gametes-un-point-sur-le-debat/ http://owni.fr/2010/11/19/levee-de-l%e2%80%99anonymat-des-donneurs-de-gametes-un-point-sur-le-debat/#comments Fri, 19 Nov 2010 10:18:26 +0000 Audrey Desantis http://owni.fr/?p=36134 Donneur, receveur, enfant issu d’IAD (insémination artificielle avec donneur) devenu maintenant adulte : suite à la tribune-témoignage d’Albertine Proust publiée le 9 septembre sur Sciences et Démocratie, chacun a eu l’occasion de donner son avis pour alimenter un débat riche et parfois passionné. Et force est de constater qu’à la veille du vote par l’Assemblée Nationale du projet de loi proposé par Roselyne Bachelot, ex-Ministre de la santé, le débat est loin d’être encore clos.

Une quête d’identité incomprise, des limites obscures

Roselyne Bachelot a tenu à l’assurer plusieurs fois : “l’anonymat du donneur sera respecté“. L’idée principale étant que le donneur de gamètes ne verra son anonymat levé qu’avec son accord préalable.  Cet accord ne sera sollicité qu’au moment de la majorité de l’enfant issu du don, si ce dernier en effectue la demande. D’après l’ex-Ministre de la santé,

“le texte prévoit aussi l’accès à des données non identifiantes du donneur, comme son âge. Des informations plus précises d’ordre socioprofessionnel et concernant sa motivation ne seront recueillies lors du don que si le donneur l’accepte.”

Les réactions sont sans appel et le doute s’installe quant à la nécessité de lever l’anonymat de telles informations. Quelles seront les limites ? Dans sa tribune, Albertine va plus loin en exprimant clairement son incompréhension face à cette “quête d’identité” :

Nous ne comprenons pas que des enfants de receveurs puissent faire de la découverte de l’identité du donneur un combat“.

Selon elle, l’histoire de l’enfant se démarque totalement de son origine génétique et du don de gamètes qu’elle a effectué mais s’ancre dans l’histoire de ses parents, de leur projet de conception, de leur chemin parcouru. Un avis parfois partagé, comme le décrit paulineadrien, dans un long commentaire argumenté.

Il me semble que le principal intérêt de retrouver le donneur pourrait être non-pas de savoir que le donneur est tourneur-fraiseur ou un polytechnicien ou qu’il mesure 1m85 [...] le principal intérêt pourrait être dans ce qu’on désigne par informations médicales“.

Un avis aussi souvent contredit, parfois de façon assez passionnelle. Un « IAD » de la première heure, aujourd’hui adulte, témoigne de sa quête identitaire :

Nous ne souhaitons pas établir ou nouer de relation durable avec notre donneur que nous ne considérons pas comme notre père ou notre mère, mais seulement voir son visage pour savoir ce qui constitue notre singularité et notre appartenance à l’humanité“.

Beaucoup semblent accepter le désir de certains adultes de connaître leurs origines génétiques, sans forcément le comprendre. Mais quelles sont les limites de la quête de chacun? Un visage, une discussion, des échanges réguliers ?

Et là, paraît la question du “tout-génétique”… et de la consanguinité !

Le coeur de la pensée d’Albertine Proust repose sur un refus de la mode du “tout-génétique” entretenue actuellement (1). Partout, l’on peut entendre parler de “gène de l’obésité”, “gène de l’intelligence”, “gène de l’alcoolisme”, un mélange de dérive sémantique – il faudrait plutôt parler de prédisposition génétique – et de scientisme édulcoré, où la biologie prend abusivement le dessus au détriment du psychologique et de l’affectif

Anne, qui témoigne sur le site de PMA (Procréation Médicalement Anonyme), association défendant la levée de l’anonymat, illustre bien cette idée :

Le plus difficile c’est de savoir que je ne saurai jamais qui est mon “père”, car pour moi il n’est ni un géniteur, ni un donneur… c’est mon père, biologique évidemment, mais mon père tout de même.

Dès lors se pose la question de définir les notions de père, mère, d’identité ou d’origine. Une question dont on trouve des éléments de réponse parmi les commentaires de la tribune. Eric défend l’idée de ne pas

confondre le fait de vouloir connaître ses conditions de naissance et le fait d’attribuer à la biologie des effets déterministes sur l’identité.

Quant à l’accès aux informations sur les donneurs, Valgm s’interroge :

Quand on vous fait miroiter l’illusion que c’est important, que ça vous sera bénéfique, comment ne pas être tenté ? Et tout ça pour quelles conséquences ?

Cette importance accordée aux gènes donne naissance à une peur tout aussi profonde que relativement injustifiée : celle du demi-frère ou de la demi-sœur cachés avec lesquels l’adulte issu d’IAD craint un rapport incestueux. Cette problématique est d’ailleurs abordée très vite dans le débat des internautes, notamment avec Chloé qui pose une question essentielle :

Cela voudrait-il dire qu’un enfant issu du don, et le sachant, vivra dans la peur constante de s’éprendre d’un demi-frère et devrait alors se restreindre à choisir qui ne lui ressemble pas de peur d’être en couple avec un membre de sa famille génétique ?“.

A vrai dire, la probabilité que cela arrive est quasiment nulle. Le risque de consanguinité est d’ailleurs plus élevé pour une personne conçue “traditionnellement”, d’après Eric qui précise qu’il y aurait

3 % d’enfants dont le père n’est pas l’ascendant génétique suite à un adultère“.

En France, depuis 1973, date de création des Cecos (Centre d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains), 50 000 enfants ont vu le jour suite à une IAD grâce à 9000 donneurs. Les lois de bioéthique instaurées en 1994 brident chacun à cinq dons, limite relevée plus tard à dix dons pour faire face à la pénurie de donneurs. Autrement dit, une goutte d’eau sur le nombre de naissances total depuis le début des années 70 (environ 30 millions). Pourtant, cette peur de la consanguinité et de l’inceste qui pourrait en résulter existe bel et bien.

Encore une fois, est-ce que l’on accorde une trop grande importance à la génétique et aux chromosomes, oubliant toute notion anthropologique de ce qu’est une famille, un “frère”, une “soeur” ? Quid de la notion de filiation entre le receveur et son enfant ? Faut-il conserver le mode actuel basé sur la filiation dite “charnelle” qui ne différencie pas un enfant issu d’un don d’un enfant “biologique” ou bien opter pour un mode proche de la filiation adoptive, en révélant donc potentiellement l’identité du donneur sur le certificat de naissance de l’enfant ?

Rétroactivité de la loi, sentiment de trahison et peur d’une diminution des dons

Après l’annonce de Roselyne Bachelot, les anciens donneurs se sont un peu sentis trahis et déconcertés face à une mesure allant à l’encontre des préconisations du rapport Leonetti publiées en janvier 2010. Pour Albertine Proust :

Maintenant que nous avons compris que notre anonymat pourrait à tout moment être remis en cause [...] la réaction la plus intelligente serait de demander la destruction de ce qu’il reste de nos dons. Nous ne voulons pas nous y résoudre

Et 70 % des donneurs suivent peu ou prou cet avis en étant contre la levée de l’anonymat. 60 % renonceraient d’ailleurs au don s’il leur était imposé de dévoiler leur identité. Du côté des receveurs aussi, des réactions hostiles naissent. Un quart d’entre eux semblerait renoncer à leur projet d’enfant si l’anonymat était levé. Par peur de voir leur famille déstabilisée ?

La peur de voir les dons diminuer s’accentue dans un contexte où les temps d’attente atteignent déjà six mois à un an pour bénéficier d’une IAD. Pour certains, aucun doute qu’une telle mesure va conduire à la “fuite” des dons et au développement de filières parallèles de dons illicites, sans limite, sans suivi, sans accompagnement. `

Pourtant les chiffres de pays précurseurs dans le domaine semblent indiquer le contraire. En Suède, premier pays dans le Monde à voter le même type de loi en 1984, le nombre de donneurs s’est stabilisé un an après son entrée en vigueur. Le Royaume-Uni ne paraît pas non-plus avoir été touché statistiquement par la levée de l’anonymat en 2005.

Mais le problème est ailleurs :

ne vaudrait-il pas mieux accompagner les couples qui ont recours à ces banques de gamètes?

interroge très justement Chloé en réponse à Albertine Proust. Toute la question est là.

Peu de parents révèlent à leurs enfants la façon dont ils ont été conçus, à cause du tabou et parfois de la honte de l’infertilité et des difficultés rencontrées. Mais alors que l’intérêt des enfants est à présent le plus mis en avant, ne serait-il pas plus constructif de mettre en avant l’intérêt de la famille dans son ensemble, autour du projet parental ? Quelles pourraient être les solutions mises en place pour accompagner les “receveurs” dans leur démarche et tout au long de leur vie ? Ces interrogations restent en suspens.

>> Article initialement co-publié sur Sciences et Démocratie & Prisme de tête

>> Images CC Flickr : M i x y et wellcome images

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Mon médecin, l’Internet et moi: bilan de santé http://owni.fr/2010/08/05/mon-medecin-linternet-et-moi-bilan-de-sante-2/ http://owni.fr/2010/08/05/mon-medecin-linternet-et-moi-bilan-de-sante-2/#comments Thu, 05 Aug 2010 15:29:36 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=22402

Si le médecin est toujours la référence et la première source d’information en matière de santé, il doit désormais faire face à une concurrence en ligne. En effet, 7 Français sur 10 consultent Internet pour trouver des informations à propos de la santé. Depuis le milieu des années 2000, on observe un développement de ces sites à la qualité variable et dont les intérêts ne sont pas forcément ceux de l’internaute. Un terrain que les médecins français investissent avec timidité : selon Jacques Lucas, vice-président du Conseil national de l’ordre des médecins (Cnom) en charge des technologies de l’information et de la communication, il y aurait environs 2000 sites de médecins en France, un chiffre à rapporter aux plus de 200.000 praticiens en tous genres.

Cette  situation a été évoquée en mai dernier lors d’un débat organisé à l’initiative du Cnom, “L’évolution de la relation médecins-patients à l’heure d’Internet” [PDF], qui présentait entre autres les résultats d’une étude menée conjointement avec Ipsos. [PDF]

Une offre légale variée

Actuellement que peut trouver un internaute en matière de santé ? L’éventail est large. On pense immédiatement aux portails généralistes dont Doctissimo est le leader ou encore Atoute.org du docteur Dupagne qui propose essentiellement des forums. Mais il existe aussi des sites d’échanges entre patients, via par exemple des communautés rassemblées autour d’une pathologie (diabète, cancer…), des sites d’associations (Association Française des Malades de la Thyroïde, association des malades et opérés cardiaques…) et des sites de médecins. Enfin, on attend aussi le développement des Espaces numérique régionaux de santé (ENRS) entériné par la loi Hôpital, Patient, santé et territoire et testé par la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Tous ces sites sont a priori neutres.

En revanche, la vente de médicaments en ligne demeure interdite en France à ce jour, bien que la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, ait annoncé que cette vente puisse être envisagée pour certains médicaments vendus sans ordonnance.

Qui consulte internet sur les sujets santé ?

Les personnes qui recherchent de l’information sont plus souvent de femmes, encore en charge du secteur ’santé’ dans la famille. Les malades sont logiquement bien présents, ainsi que ceux qui cherchent un médecin ou un spécialiste. Mais comme on pourrait l’imaginer, les plus âgés sont les moins enclins à adopter cette pratique, avec une fracture générationnelle autour de la ligne des 65 ans. Enfin, si on trouve des hypocondriaques, ils n’ont pas attendu le web pour donner libre court à leur marotte (cf Le Malade imaginaire, 1673).

Le médecin est toujours le référent privilégié

"Je vous écoute".

L’étude Ipsos montre qu’Internet talonne maintenant le médecin comme source d’information principale, avec respectivement 64% et 89%. Cependant, Internet ne dispose pas du même crédit : parmi les sources d’information auxquelles les Français font le plus confiance (deux réponses à donner), on trouve en tête le médecin (90%) et le pharmacien (40%), Internet arrivant en troisième (17%). En ligne, on se renseigne avant tout sur une maladie ou ses symptômes (65%), un médicament ou un traitement médical (42%), des conseils pratiques pour rester en bonne santé (42%) et des témoignages d’autres patients (17%).

Une évolution jugée positive

Les patients pensent que  cette évolution de l’accès aux informations sur la santé est positive. En effet, toujours selon la même étude Ispos, “36% considèrent que les relations qu’ils entretiennent avec les médecins sont devenues plus constructives et basées sur le dialogue, et 30% qu’elles sont plus franches qu’auparavant”. Certaines pathologies, pour des raisons de pudeur, par exemple, seront abordées plus facilement caché derrière l’écran de l’ordinateur. Il n’est pas facile de dire à son médecin de famille qu’on a des problèmes d’érection.

Au cours du débat Gérard Raymond, président de l’association des diabétiques, a souligné que l’objectif des internautes “n’est pas d’en savoir autant que leur médecins” : il y a là-dedans du cliché vendu par les médias. Le docteur Lucas nous a précisé que cela concernait surtout le médecin généraliste, en pleine crise : “Jusqu’à présent il se vivait comme sachant tout, or cela ne marche plus ainsi.”

En revanche, les patients souhaitent “pouvoir faire confiance à leur médecin et mieux dialoguer”. Le médecin endosse désormais un nouveau rôle : faire le tri dans les informations que le patient a récupéré sur le Net. Le patient est désormais aussi “capable d’interpréter les mots du médecin. Il sera dès lors un patient plus actif et davantage acteur dans sa maladie. Cela constitue un virage majeur dans la relation médecin-patients.”

Il apparait aussi une attente envers le médecin : “62% des Français affirment qu’ils consulteraient le blog ou le site Internet de leur médecin si ce dernier venait à en ouvrir un. [...] 38% des Français qui n’utilisent actuellement pas Internet comme vecteur d’information médicale seraient enclins à se connecter pour visiter le blog ou le site de leur patient.”

Du côté des médecins, les points de vue divergent. D’une part, la fracture observée chez les patients aurait tendance à se retrouver aussi du côté des praticiens : après 55 ans, Internet est moins intégré dans leur pratique. Or, en moyenne, le corps professionnel a 50 ans. Le professeur Lucas explique que les “anciens” auraient tendance à mettre en avant les dangers de l’Internet, son aspect “sulfureux” en regrettant la période passée. Il rajoute aussi le manque de temps.

Un point de vue que Marie-Thérèse Giorgio, médecin du travail et présidente  de l’association Médecins Maîtres-toile (MMT) qui regroupe des médecins webmasters   depuis 1998, nuance en évoquant un de leurs webmasters qui a plus de 80 ans et une fracture numérique générationnelle en train de se réduire.

En outre, d’après un sondage évoqué lors du débat, “la grande majorité des professionnels de santé seraient favorables à l’idée de prescrire de l’information médicale” et selon le sondage Ipsos, lorsque le patient indique à son médecin qu’il consulte des sites d’information médicale, deux tiers des médecins réagissent positivement. Le docteur François Stefani a aussi insisté sur l’intérêt du web : “Certains patients n’ont pas l’habitude qu’on les écoute et ne savent pas quoi répondre quand le médecin leur dit : “je vous écoute”. Internet constitue un formidable outil pour initier ce dialogue.“Il a également évoqué la consultation par chat, qui permet au médecin de connaître les questions que [les patients] n’osent pas lui poser.” Nous sommes donc loin de la diabolisation et du rejet évoqués par le docteur Lucas.

Le problème de la qualité de l’information

Comme tout thème traité sur le web, la santé a droit à des fortunes diverses. Pour aider à faire le tri, il existe des certifications. En France, c’est la certification HON (Health On Net), gérée par une fondation basée à Genève, qui est chargée de les certifier depuis la loi de 2004. “Ce dispositif existait déjà, nous n’allions pas réinventer la roue”, nous a expliqué le docteur Lucas. Mais elle n’a pas un caractère obligatoire et repose sur le volontariat. En France, elle surveille 1.600 sites et en a certifié 900. En revanche, elle ne signale pas les sites sujets à caution car ce n’est pas légal, a précisé Célia Boyer, directrice exécutive de la Fondation.

Le site du ministère de la Santé est certifié HON.

Parmi ses critères, Health On Net cite “l’indication de l’origine des sources d’information, l’indication des références scientifiques, la date de rédaction des articles, le but du site, le respect de la confidentialité, le financement et la différenciation entre la politique éditoriale du site”. Health On Net “évalue le contenu du site et s’assure qu’il ne délivre pas des messages publicitaires déguisés.”

Mais elle suscite des réserves. Pour  Marie-Thérèse Giorgio, “Il parait impossible de certifier le contenu, et des sites ont été certifiés HON sans qu’il semble qu’ils le méritent. Le docteur Dupagne [membres de MMT, ndlr] s’en est détaché, d’autres devraient le faire je ne vous le cache pas.” Dans un post assez cinglant, ce docteur s’en prenait à plusieurs points de la charte :

“Le point 5 n’est pas évident : justifier les bienfaits des produits présentés’. Le terme est vague, n’importe quelle enquête ou étude scientifique bidon peut être présentée comme une justification. Le sceau HONcode pourrait laisser penser à un lecteur naïf que tout ce qu’il va lire est validé. Or mieux vaut une information publicitaire que le lecteur sait décoder, qu’une information fausse labellisée à tort comme exacte.

Le point 6 est démodé et ambigu. Le professionnalisme veut-il dire que seuls les médecins peuvent écrire sur la santé ? Qu’un blogueur n’a pas le droit d’être anonyme ? Les blogueurs anonymes et/ou non professionnels sont parmi les meilleurs auteurs médicaux.

Les points 7 et 8 constituent le nerf de la guerre et ce sont eux qui posent le plus de problèmes. Les sites tenus par des gourous ou des illuminés ne constituent pas le principal danger sur la toile médicale. Ceux qui posent problème sont les sites commerciaux déguisés.”

La certification de Doctissimo, par exemple, ne fait pas l’unanimité : “Enfin, il est question dans les médias que Doctissimo obtienne le HONcode, ce qui serait le pompon. Malgré tout le respect que j’ai pour la réussite financière de ce site, la publicité est tellement bien intégrée au contenu qu’elle en devient parfois indiscernable.”

Capture d'écran de la HP de Doctissimo le 22 juillet dernier. Derrière la publicité, vous trouverez de l'information médicale.

Marie-Thérèse Giorgio complète : “Le site a mis plus d’une année à l’obtenir et Célia Boyer, directrice exécutive de HON, est consciente que ça ne fait pas l’unanimité et indique que la fondation peut  retirer la certification à tout moment“. “En plus la situation de cette certification reste ambiguë, ajoute la présidente de MMT, Doctissimo a annoncé qu’il l’avait [sur la partie éditoriale, ndlr] mais que, pour des raisons techniques, elle n’était pas présente sur le site [elle n'est toujours pas visible actuellement, ndlr]. Elle est en effet hébergée chez HON pour en garder le contrôle, or cela ferait tomber leurs serveurs en raison du trafic élevé“. Le docteur Lucas estime lui aussi que “la certification HON n’est pas très regardante”.

Ce qui ne veut pas dire que les contenus en eux-mêmes soient douteux : les bases de Doctissimo ont été jugés bonnes par les médecins que nous avons interrogés. Aux origines du site, il y a d’ailleurs deux médecins et l’équipe comprend des médecins journalistes et des journalistes scientifiques. Contacté à plusieurs reprises, Doctissimo n’a jamais donné suite à nos demandes d’entretien.

Une certification mal connue

De toute façon, encore faut-il que les internautes sachent que la certification HON existe. En effet, si 12 % des Français ne consultent que des sites certifiés, 71% des personnes consultant des sites sur la santé disent ne pas être capable de faire la différence entre les sites certifiés et les autres. Or, on peut y voirune certaine naïveté puisque 74% considèrent que l’information sur le Net est fiable. Célia Boyer souligne que “l’internaute néophyte en matière de santé sur Internet n’est pas conscient de la qualité des informations qu’il y trouve.”

En matière de fiabilité, il faut aussi souligner que le domaine de la santé n’échappe pas à une règle générale du web : l’autorégulation. “Lorsqu’il y a des aberrations, une personne normale les repère, de même que les trolls”, note le docteur Lucas. Le problème, entre autres, ce sont les personnes malades en position de fragilité psychologique, plus enclines à croire ce qui leur tombe sous la souris. De plus, les parties dynamiques -forum, chats…- sont évidemment plus difficiles à contrôler.

Le web social, ce douloureux problème

Dernier point et non des plus faciles, l’intégration de la dimension sociale du web. Sur ce point, les avis divergent, entre ceux qui ne souhaitent pas investir ce champ et ceux qui au contraire estiment qu’il faut y aller car les patients y sont. On constate déjà que des patients demandent à être “ami” avec leur médecin. MMT administre cent-dix sites, des blogs, des pages Facebook (dont la leur, à la timide trentaine de membres) et tweetent aussi.

Si investir le web est devenu un passage aussi obligé que le vaccin anti-tétanos, ses modalités restent donc encore à préciser et améliorer. Comment s’attaquer avec intelligence aux problèmes évoqués ? Échange de points de vue dans la suite de notre dossier.

J’arrête le HONcode (1) par le docteur Dupagne ; Le site de HONcode ; le site de l’AQIS (Association pour la Qualité de l’Internet Santé)

Le site de Médecins Maîtres-toile ; le blog de Denise Silber, consultante e-santé

Image CC Flickr SanforaQ8 et Seattle Municipal Archives

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http://owni.fr/2010/08/05/mon-medecin-linternet-et-moi-bilan-de-sante-2/feed/ 1
Mon médecin, l’Internet et moi: bilan de santé http://owni.fr/2010/08/05/mon-medecin-linternet-et-moi-bilan-de-sante/ http://owni.fr/2010/08/05/mon-medecin-linternet-et-moi-bilan-de-sante/#comments Thu, 05 Aug 2010 15:29:36 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=22402

Si le médecin est toujours la référence et la première source d’information en matière de santé, il doit désormais faire face à une concurrence en ligne. En effet, 7 Français sur 10 consultent Internet pour trouver des informations à propos de la santé. Depuis le milieu des années 2000, on observe un développement de ces sites à la qualité variable et dont les intérêts ne sont pas forcément ceux de l’internaute. Un terrain que les médecins français investissent avec timidité : selon Jacques Lucas, vice-président du Conseil national de l’ordre des médecins (Cnom) en charge des technologies de l’information et de la communication, il y aurait environs 2000 sites de médecins en France, un chiffre à rapporter aux plus de 200.000 praticiens en tous genres.

Cette  situation a été évoquée en mai dernier lors d’un débat organisé à l’initiative du Cnom, “L’évolution de la relation médecins-patients à l’heure d’Internet” [PDF], qui présentait entre autres les résultats d’une étude menée conjointement avec Ipsos. [PDF]

Une offre légale variée

Actuellement que peut trouver un internaute en matière de santé ? L’éventail est large. On pense immédiatement aux portails généralistes dont Doctissimo est le leader ou encore Atoute.org du docteur Dupagne qui propose essentiellement des forums. Mais il existe aussi des sites d’échanges entre patients, via par exemple des communautés rassemblées autour d’une pathologie (diabète, cancer…), des sites d’associations (Association Française des Malades de la Thyroïde, association des malades et opérés cardiaques…) et des sites de médecins. Enfin, on attend aussi le développement des Espaces numérique régionaux de santé (ENRS) entériné par la loi Hôpital, Patient, santé et territoire et testé par la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Tous ces sites sont a priori neutres.

En revanche, la vente de médicaments en ligne demeure interdite en France à ce jour, bien que la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, ait annoncé que cette vente puisse être envisagée pour certains médicaments vendus sans ordonnance.

Qui consulte internet sur les sujets santé ?

Les personnes qui recherchent de l’information sont plus souvent de femmes, encore en charge du secteur ’santé’ dans la famille. Les malades sont logiquement bien présents, ainsi que ceux qui cherchent un médecin ou un spécialiste. Mais comme on pourrait l’imaginer, les plus âgés sont les moins enclins à adopter cette pratique, avec une fracture générationnelle autour de la ligne des 65 ans. Enfin, si on trouve des hypocondriaques, ils n’ont pas attendu le web pour donner libre court à leur marotte (cf Le Malade imaginaire, 1673).

Le médecin est toujours le référent privilégié

"Je vous écoute".

L’étude Ipsos montre qu’Internet talonne maintenant le médecin comme source d’information principale, avec respectivement 64% et 89%. Cependant, Internet ne dispose pas du même crédit : parmi les sources d’information auxquelles les Français font le plus confiance (deux réponses à donner), on trouve en tête le médecin (90%) et le pharmacien (40%), Internet arrivant en troisième (17%). En ligne, on se renseigne avant tout sur une maladie ou ses symptômes (65%), un médicament ou un traitement médical (42%), des conseils pratiques pour rester en bonne santé (42%) et des témoignages d’autres patients (17%).

Une évolution jugée positive

Les patients pensent que  cette évolution de l’accès aux informations sur la santé est positive. En effet, toujours selon la même étude Ispos, “36% considèrent que les relations qu’ils entretiennent avec les médecins sont devenues plus constructives et basées sur le dialogue, et 30% qu’elles sont plus franches qu’auparavant”. Certaines pathologies, pour des raisons de pudeur, par exemple, seront abordées plus facilement caché derrière l’écran de l’ordinateur. Il n’est pas facile de dire à son médecin de famille qu’on a des problèmes d’érection.

Au cours du débat Gérard Raymond, président de l’association des diabétiques, a souligné que l’objectif des internautes “n’est pas d’en savoir autant que leur médecins” : il y a là-dedans du cliché vendu par les médias. Le docteur Lucas nous a précisé que cela concernait surtout le médecin généraliste, en pleine crise : “Jusqu’à présent il se vivait comme sachant tout, or cela ne marche plus ainsi.”

En revanche, les patients souhaitent “pouvoir faire confiance à leur médecin et mieux dialoguer”. Le médecin endosse désormais un nouveau rôle : faire le tri dans les informations que le patient a récupéré sur le Net. Le patient est désormais aussi “capable d’interpréter les mots du médecin. Il sera dès lors un patient plus actif et davantage acteur dans sa maladie. Cela constitue un virage majeur dans la relation médecin-patients.”

Il apparait aussi une attente envers le médecin : “62% des Français affirment qu’ils consulteraient le blog ou le site Internet de leur médecin si ce dernier venait à en ouvrir un. [...] 38% des Français qui n’utilisent actuellement pas Internet comme vecteur d’information médicale seraient enclins à se connecter pour visiter le blog ou le site de leur patient.”

Du côté des médecins, les points de vue divergent. D’une part, la fracture observée chez les patients aurait tendance à se retrouver aussi du côté des praticiens : après 55 ans, Internet est moins intégré dans leur pratique. Or, en moyenne, le corps professionnel a 50 ans. Le professeur Lucas explique que les “anciens” auraient tendance à mettre en avant les dangers de l’Internet, son aspect “sulfureux” en regrettant la période passée. Il rajoute aussi le manque de temps.

Un point de vue que Marie-Thérèse Giorgio, médecin du travail et présidente  de l’association Médecins Maîtres-toile (MMT) qui regroupe des médecins webmasters   depuis 1998, nuance en évoquant un de leurs webmasters qui a plus de 80 ans et une fracture numérique générationnelle en train de se réduire.

En outre, d’après un sondage évoqué lors du débat, “la grande majorité des professionnels de santé seraient favorables à l’idée de prescrire de l’information médicale” et selon le sondage Ipsos, lorsque le patient indique à son médecin qu’il consulte des sites d’information médicale, deux tiers des médecins réagissent positivement. Le docteur François Stefani a aussi insisté sur l’intérêt du web : “Certains patients n’ont pas l’habitude qu’on les écoute et ne savent pas quoi répondre quand le médecin leur dit : “je vous écoute”. Internet constitue un formidable outil pour initier ce dialogue.“Il a également évoqué la consultation par chat, qui permet au médecin de connaître les questions que [les patients] n’osent pas lui poser.” Nous sommes donc loin de la diabolisation et du rejet évoqués par le docteur Lucas.

Le problème de la qualité de l’information

Comme tout thème traité sur le web, la santé a droit à des fortunes diverses. Pour aider à faire le tri, il existe des certifications. En France, c’est la certification HON (Health On Net), gérée par une fondation basée à Genève, qui est chargée de les certifier depuis la loi de 2004. “Ce dispositif existait déjà, nous n’allions pas réinventer la roue”, nous a expliqué le docteur Lucas. Mais elle n’a pas un caractère obligatoire et repose sur le volontariat. En France, elle surveille 1.600 sites et en a certifié 900. En revanche, elle ne signale pas les sites sujets à caution car ce n’est pas légal, a précisé Célia Boyer, directrice exécutive de la Fondation.

Le site du ministère de la Santé est certifié HON.

Parmi ses critères, Health On Net cite “l’indication de l’origine des sources d’information, l’indication des références scientifiques, la date de rédaction des articles, le but du site, le respect de la confidentialité, le financement et la différenciation entre la politique éditoriale du site”. Health On Net “évalue le contenu du site et s’assure qu’il ne délivre pas des messages publicitaires déguisés.”

Mais elle suscite des réserves. Pour  Marie-Thérèse Giorgio, “Il parait impossible de certifier le contenu, et des sites ont été certifiés HON sans qu’il semble qu’ils le méritent. Le docteur Dupagne [membres de MMT, ndlr] s’en est détaché, d’autres devraient le faire je ne vous le cache pas.” Dans un post assez cinglant, ce docteur s’en prenait à plusieurs points de la charte :

“Le point 5 n’est pas évident : justifier les bienfaits des produits présentés’. Le terme est vague, n’importe quelle enquête ou étude scientifique bidon peut être présentée comme une justification. Le sceau HONcode pourrait laisser penser à un lecteur naïf que tout ce qu’il va lire est validé. Or mieux vaut une information publicitaire que le lecteur sait décoder, qu’une information fausse labellisée à tort comme exacte.

Le point 6 est démodé et ambigu. Le professionnalisme veut-il dire que seuls les médecins peuvent écrire sur la santé ? Qu’un blogueur n’a pas le droit d’être anonyme ? Les blogueurs anonymes et/ou non professionnels sont parmi les meilleurs auteurs médicaux.

Les points 7 et 8 constituent le nerf de la guerre et ce sont eux qui posent le plus de problèmes. Les sites tenus par des gourous ou des illuminés ne constituent pas le principal danger sur la toile médicale. Ceux qui posent problème sont les sites commerciaux déguisés.”

La certification de Doctissimo, par exemple, ne fait pas l’unanimité : “Enfin, il est question dans les médias que Doctissimo obtienne le HONcode, ce qui serait le pompon. Malgré tout le respect que j’ai pour la réussite financière de ce site, la publicité est tellement bien intégrée au contenu qu’elle en devient parfois indiscernable.”

Capture d'écran de la HP de Doctissimo le 22 juillet dernier. Derrière la publicité, vous trouverez de l'information médicale.

Marie-Thérèse Giorgio complète : “Le site a mis plus d’une année à l’obtenir et Célia Boyer, directrice exécutive de HON, est consciente que ça ne fait pas l’unanimité et indique que la fondation peut  retirer la certification à tout moment“. “En plus la situation de cette certification reste ambiguë, ajoute la présidente de MMT, Doctissimo a annoncé qu’il l’avait [sur la partie éditoriale, ndlr] mais que, pour des raisons techniques, elle n’était pas présente sur le site [elle n'est toujours pas visible actuellement, ndlr]. Elle est en effet hébergée chez HON pour en garder le contrôle, or cela ferait tomber leurs serveurs en raison du trafic élevé“. Le docteur Lucas estime lui aussi que “la certification HON n’est pas très regardante”.

Ce qui ne veut pas dire que les contenus en eux-mêmes soient douteux : les bases de Doctissimo ont été jugés bonnes par les médecins que nous avons interrogés. Aux origines du site, il y a d’ailleurs deux médecins et l’équipe comprend des médecins journalistes et des journalistes scientifiques. Contacté à plusieurs reprises, Doctissimo n’a jamais donné suite à nos demandes d’entretien.

Une certification mal connue

De toute façon, encore faut-il que les internautes sachent que la certification HON existe. En effet, si 12 % des Français ne consultent que des sites certifiés, 71% des personnes consultant des sites sur la santé disent ne pas être capable de faire la différence entre les sites certifiés et les autres. Or, on peut y voirune certaine naïveté puisque 74% considèrent que l’information sur le Net est fiable. Célia Boyer souligne que “l’internaute néophyte en matière de santé sur Internet n’est pas conscient de la qualité des informations qu’il y trouve.”

En matière de fiabilité, il faut aussi souligner que le domaine de la santé n’échappe pas à une règle générale du web : l’autorégulation. “Lorsqu’il y a des aberrations, une personne normale les repère, de même que les trolls”, note le docteur Lucas. Le problème, entre autres, ce sont les personnes malades en position de fragilité psychologique, plus enclines à croire ce qui leur tombe sous la souris. De plus, les parties dynamiques -forum, chats…- sont évidemment plus difficiles à contrôler.

Le web social, ce douloureux problème

Dernier point et non des plus faciles, l’intégration de la dimension sociale du web. Sur ce point, les avis divergent, entre ceux qui ne souhaitent pas investir ce champ et ceux qui au contraire estiment qu’il faut y aller car les patients y sont. On constate déjà que des patients demandent à être “ami” avec leur médecin. MMT administre cent-dix sites, des blogs, des pages Facebook (dont la leur, à la timide trentaine de membres) et tweetent aussi.

Si investir le web est devenu un passage aussi obligé que le vaccin anti-tétanos, ses modalités restent donc encore à préciser et améliorer. Comment s’attaquer avec intelligence aux problèmes évoqués ? Échange de points de vue dans la suite de notre dossier.

J’arrête le HONcode (1) par le docteur Dupagne ; Le site de HONcode ; le site de l’AQIS (Association pour la Qualité de l’Internet Santé)

Le site de Médecins Maîtres-toile ; le blog de Denise Silber, consultante e-santé

Image CC Flickr SanforaQ8 et Seattle Municipal Archives

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