Hollande Sarkozy Internet compatibles
Ce jeudi, les responsables numériques de François Hollande et Nicolas Sarkozy ont confronté les programmes de leur candidat sur Internet. Enfin, plein de bonne volonté, ils ont tenté de les confronter. Sans qu'apparaissent de réelles lignes de fracture.
“Mais au fond, qu’est-ce qui vous oppose ?” La question s’est imposée au terme d’un débat organisé aujourd’hui entre Fleur Pellerin et Nicolas Princen. À l’invitation du Collectif du numérique, groupement de 21 associations et syndicats du secteur, les e-cautions de François Hollande (pour l’une) et Nicolas Sarkozy (pour l’autre) ont défendu le programme de leur poulain sur Internet. Sans qu’apparaissent des lignes de fracture réelles.
Consensus apparent
Tout deux se sont d’abord accordés sur “l’importance du numérique” – d’usage. À les en croire, Internet “infuse dans tout le programme de François Hollande” d’un côté, tout en étant au cÅ“ur d’un “investissement personnel fort de Nicolas Sarkozy” de l’autre.
Même consensus sur le fond, dominé par des échanges portant sur l’économie, l’éducation et la formation. Favorables à la constitution d’un écosystème numérique compétitif, fondé sur le soutien aux PME (Petites et Moyennes Entreprises), Fleur Pellerin et Nicolas Princen ont également plaidé en faveur de l’enseignement d’Internet dès le lycée. “Il faut aider [les élèves] à coder et décoder cet univers” a indiqué la responsable socialiste, que son rival n’a pas cherché à contredire, ajoutant que la formation constituait le “projet central de Nicolas Sarkozy”.
Divergences
Les silences ont été les premiers révélateurs des divergences. Grande oubliée du débat, la question de la liberté sur Internet a ainsi été évacuée par l’ancien conseiller Internet de l’Élysée. Pas un mot sur le filtrage, le traité Acta ou la surveillance, quand la responsable PS a rappelé l’attachement de son parti aux questions de neutralité du réseau ou de protection des données personnelles sur Internet. Fleur Pellerin a ainsi évoqué le projet d’institution d’un “Habeas corpus numérique”, pierre angulaire du projet numérique de François Hollande.
L’intervention de Nicolas Princen n’a pas débordé le cadre fixé par le Collectif du numérique autour de “l’innovation, la compétitivité, la croissance et les emplois”. Pourtant, dans sa réponse au questionnaire adressé quelques semaines plus tôt par ce même collectif, l’équipe de Nicolas Sarkozy avait fait le choix d’aborder des sujets annexes à l’économie, telle que la sécurité sur Internet.
Soulevée par une intervention du public, la question a mené Fleur Pellerin à dénoncer la vente de technologies de surveillance “à des dictatures” par des entreprises françaises, quand Nicolas Princen s’est contenté de saluer “l’existence de champions nationaux” dans ce domaine à fort “enjeu stratégique.”
Tranchées
Il aura finalement fallu attendre la dernière question (“Mais au fond, qu’est-ce qui vous oppose ?”) pour voir les débats s’animer et les tranchées se creuser. Fleur Pellerin a fait valoir la “une vision d’Internet” différente, estimant que dans le cas de Nicolas Sarkozy, le réseau demeurait “une zone de sauvageons, de pirates et de terroristes en puissance.” “La cybercriminalité existe” a répliqué Nicolas Princen, affirmant qu’il ne fallait pas “nier” le problème du terrorisme sur Internet et tâclant sa rivale sur son manque d’expérience : “vous n’avez peut-être pas suivi l’actualité du numérique comme j’ai pu le faire ces dernières années.”
L’occasion d’évoquer l’autre grande absente du débat : Hadopi. Un sujet dont on a déjà trop parlé au détriment d’autres plus intéressants” a déploré Fleur Pellerin. “Nous n’avons toujours pas compris ce que vous vouliez faire dans ce domaine” s’est empressé de rétorquer Nicolas Princen, pointant du doigts les errements du candidat socialiste concernant le sort à donner à la Haute autorité.
Saluant la qualité du débat, certains membres du Collectif numérique ont néanmoins indiqué “rester sur leur faim” :
“Il faut que les candidats l’intègrent à leur discours. Tant qu’il n’y aura pas appropriation, cela ressemblera à une déclaration d’intention.”
Et c’est là que le bât blesse. Au-delà de la compétence et de l’enthousiasme des personnes en charge du numérique, joue aussi et surtout leur capacité à influencer les présidentiables en personne. Or François Hollande et Nicolas Sarkozy ne se sont pas positionnés sur Internet durant cette campagne. Et un intervenant de conclure : “je pense qu’on aura un Président numérique dans 40 ans.” Pas avant.
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Photo par Ophelia Noor pour Owni
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